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François Mahé


Invité

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Oui, bien sûr, j'ai remarqué son décès.

Comme il est breton et était un bon coureur, il faisait partie de ceux dont je suivais les performances attentivement sur le TdF.

J'ai couru avec lui au moins une fois, à Callac en 1964.

Je ne sais pas ce qu'il était devenu. Discret en tout cas.

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Décédé le jour de ma naissance, l'Arradonnais était un fervent "adorateur" du "Derby" (Mais putain ! pourquoi avoir supprimé cette épreuve !!!!). Coursier régulier et somme toute complet, il fut dauphin de Soler sur la Vuelta 1961 mais surtout, il domina Perez Frances à cette occasion (3ème) ! Cinquième du Tour 59 remporté par l'"Aigle Tolède" lors d'une épreuve où es Français HYPERFAVORIS ont inventé la course par équipes en solitaire, il sauva les meubles grâce à un professionnalisme sans faille. C'était l'époque reine des "sans grade" de qualités tant le dessus du panier était gratiné avec les Bobet, Géminiani, Anquetil, Poulidor, Rivière, Saint, Anglade, Bonvin, "Walko" et tutti ! 😉

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Je crois que c'est lui qui avait était battu par Anquetil lors de Bordeaux Paris l'année où maitre Jacques avait fait le fameux doublé Dauphiné Libéré-Bordeaux Paris.Je me rappelle d'une photo émouvante lisant la déception de Mme Mahé, à côté de Jeannine, voyant apparaitre sur le vélodrome d'arrivée Jacques Anquetil.

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Mahé terminera quatrième !

 

Extraordinaire doublé, Dauphiné - « Derby » 1965 de « Maître Jacques ».

 

 

L'exploit que je m'apprête à vous narrer, aujourd'hui, s'apparente plus à un cas d'aliénation qu'à un quelconque fait de course, fut ce-t-il d'anthologie. Ce qui va suivre dépasse, en effet, l'entendement. Souvent la légende nous a confronté à des situations dantesque, chevaleresques, burlesques, parfois même, et nos héros se sont montrés en toutes circonstances dignes de nos idéaux vélocipédiques à savoir, braves, héroïques, incomparables que ce soit dans la liesse enivrante ou la détresse affligeante. Les défis, les challenges, les « sautes ruisseau », d’hier et d’aujourd’hui, les ont relevé sans jamais subodorer que ceux-ci génèreraient l’admiration sans borne de leurs contemporains. Le cyclisme est, certainement, l’unique discipline où l’irrationnel, avec un grand I, peut convaincre un cartésien invétéré, pur et dur, tel que votre serviteur. A l’aube du vingtième siècle, lorsque le cyclisme se situait aux prémices de sa floraison, les conditions de courses, primaires et exécrables, favorisaient l’évènement et l’avènement. Nos aïeux se sont délectés sans modération de faits qui apparaissent, de nos jours, utopiques et chimériques pour des personnes non avertis des choses de la « Petite Reine ». L’incompréhension mêlée à la jalousie, nés de ce « patrimoine culturel », que renie sans cesse les irascibles « biens pensants », ont engendré, au fil du temps et des années, le mépris et la désaffection d’une partie de l’opinion publique. L’authenticité du cyclisme interpelle et la « folie ponctuelle » des « Géants de la route » ravive d’anciennes querelles dues à l’excellence de sa notoriété passée. Pourtant le vélo, de par sa conception et son utilisation, demeurera, à jamais, synonyme d’exploit, de courage, de solidarité et d’abnégation. Le récit que je m’achemine à vous dévoiler, humblement, vient corroborer cet état de fait.

Tout récemment auréolé d’un cinquième succès dans la Grande Boucle, ce qui en fait, naturellement, le recordman absolu, « Maître Jacques » s’adonne, songeusement, aux plaisirs du farniente réparateur et salvateur. Ses pensées vagabondes et l’amertume l’étreint soudain. Cette dernière levée n’a pas, selon lui, été obtenu de la manière dont il l’aurait souhaité. Un Giro arraché aux griffes d’une coalition de tous les instants semble avoir été l’élément déterminent à son, bref mais douloureux, fléchissement lors de l’étape dantesque du Puy de Dôme. La dépense d’énergie engendrée et abandonnée sur les pentes escarpées des Dolomites a, n’en déplaise à l’intéressé, nuit au rendement final du Normand lors de cette inoubliable journée du 12 juillet. En outre, la popularité dont a été ceint, ce jour-là, son adversaire du jour, le très pugnace Raymond Poulidor, l’a rendu un soupçon maussade. Cette morosité conflictuelle et ambiante qui flâne puis pèse sur et dans l’entourage du natif de Mont Saint Aignan aura des répercussions insoupçonnée, car insoupçonnable, sur le déroulement, et l’essence même, de la saison 1965.  En effet, Jacques Anquetil, après avoir, mûrement et longuement,  réfléchi et évalué, en toute sérénité, les tenants et les aboutissants de son intime  résolution, décide que le Tour de France 65 ne le verrait pas défendre son titre si chèrement acquis un an plus tôt. Les raisons invoquées sont multiples mais toutes portent en elles la légitimité de son auteur. La popularité du Limougeaud l’agace et l’excède au plus haut point, c’est un secret de « Polichinelle », et une année sabbatique pourrait s’avérer, selon lui, bénéfique à son image d’insatiable despote. En outre, la motivation d’un sixième succès ne le tenaille pas, outre mesure, en revanche, nombres de défis, jamais encore relevés car nullement imaginés, nourrissent son excitation et attisent sa convoitise jamais rassasiée.

Ce challenge ahurissant et, osons, « suicidaire » sera d’enchaîner, sans la moindre journée de repos, le Critérium du Dauphiné Libéré et Bordeaux Paris dans la foulée, deux épreuves atypiques demandant des aptitudes diamétralement opposées. L’hérésie de ce futur « feuilleton » mélodramatique, soulève la désapprobation de l’ensemble de la corporation des « biens nés », éternels traditionalistes. Les frasques et le franc parlé du Normand sont pourtant monnaie courante, en ce bas monde, mais abondance de biens, ironie du sort, nuit en ces temps d’opulence, c’est bien connu. Enfin, connaissant le « bonhomme », la phrase sibylline, aujourd’hui obsolète car galvaudée, « …l’essentiel est de participer… », De l'évêque de Pennsylvanie, empruntée bien fortuitement, par notre cher Baron Pierre de Coubertin, n’a certainement pas due être la composante d’un livre de chevet de notre fougueux Rouennais d’adoption. Ce pari ? Il le veut gagnant !

Le Normand est fier et exerce son métier en bureaucrate un tantinet zélé. Même s’il se lance des défis gratinés, ce n’est pas pour euphoriser son aura, c’est simplement pour se prouver, à lui-même, qu’il est apte à se surpasser. Les lauriers, il les fustige et les abandonne, volontiers à autrui. Un jour de 65, « Bob » Chapatte lui demandait s’il accepterait : « de courir pour une médaille », la réponse fusa tel un boomerang » Non ! Le cyclisme est trop dur pour que je puisse courir pour un colifichet ! » Là-dessus, il s’en alla participer à un « gala cycliste » de solidarité organisé par le monde journalistique. C’était tout Jacques ça !

 

Raymond Poulidor demeure son plus sérieux rival à la veille de l’envol de ce Dauphiné 1965. La rivalité latente, initialement, a atteint des sommets d’incompréhension dès que le monde médiatique s’en est fait l’écho. La suprématie des épreuves par étape est à ce prix.

Jacques Anquetil porte le maillot de leader depuis l’étape qui l’a vu vaincre à Oyonnax. Grand et judicieux calculateur devant l’éternel, le Normand a pris un malin plaisir à s’octroyer le maximum de bonifications aux arrivées d’étapes. On n’est jamais trop prudent. Cette cinquième étape, menant le peloton de Thonon les Bain à Chambéry et longue de deux cent vingt-six bornes, est propre à décanter, confirmer voir chambouler l’ordre établi jusqu’ici. C’est en tous les cas l’espoir qui hante les songes et pensées « emberlificotés » du fringuant Limougeaud. 

Dès le Mont Revard, « Poupou » affiche ses ambitions en explosant un peloton déjà à l’agonie. Le moment de stupeur évanoui, « Maître Jacques » accompagné du  jeunot de chez Peugeot, Raymond Delisle, de l’espagnol Fernando Manzanèque et du « Tom pouce » Germain Karl Heinz Kunde, recolle au boyau arrière du fuyard. Ce dernier apparaît serein et métamorphosé. Après un éphémère mais significatif coup d’œil vers ses compagnons d’escalade, ce dernier improvise une nouvelle accélération démoniaque. Cette deuxième couche appliquée avec la grâce d’un bûcheron Alpin a pour effet de scier les « guibolles » flageolantes de ses quatre acolytes. Saint Léonard de Noblat est en liesse, l’enfant du pays s’est libéré de l’étreinte du « pompeux » Normand. Seul, il passe au sommet du Revard, vingt secondes devant Anquetil et le « souffre-douleur » de Roger PIngeon, Delisle qui se liquéfiera, un peu plus tard. Dans la descente, secteur privilégié, de « Nation’s man » on ne donne pas cher des chances de Poulidor de rallier Chambéry en solitaire. Pourtant, au pied de celle-ci, le Limougeaud caracole toujours à l’avant et ce, malgré les quatre-vingt-dix Km/h affichés sur le cadran des motos épousant les courbes ondoyantes du leader de l’épreuve. La portion finale de plat qui se profile nous promet un mano a mano d’envergure et épicé. Il le fut, Anquetil dans sa position traditionnelle d’esthète fait tomber les bielles dans l’huile à la perfection. Plus en avant, sur sa monture, le dos rond, Poulidor semble piocher mais l’efficacité se révèle être une constante de cette sobriété. En effet, l’écart se meurt imperceptiblement mais irréversiblement également. Le Normand est en phase d’accélération continue et c’est « Homèrien ». Le Limougeaud s’arrache mais ne se désunit pas le moins du monde et c’est « Shakespearien ». L’apothéose s’annonce « Hitchcockienne ». Bientôt, en point de mire puis dans l’aspiration, Raymond Poulidor appréhendera, la mine déconfite, le retour du TCV Paris Rouen. Détestant les omnibus, le Normand ne flânera pas en route et poussera la galéjade jusqu’à coiffer le Limougeaud sur la ligne pour la victoire d’étape. Ce dernier résistera tant bien que mal à la locomotive lors du dernier chrono de Romans et s’inclinera, finalement, pour une minute et quarante-trois secondes. Un écart correspondant, peu ou prou aux bonifications dont Anquetil s’était fait un devoir de cueillir tout au long de l’épreuve chère à Thierry Cazeneuve. Nous venions de clore trois journées démentielles où les combats âpres et sans concession furent légions et harassantes physiquement et nerveusement. Jacques Anquetil ne se trouvait, alors, qu’aux deux tiers de son insensé pari. En outre, la tâche restant à accomplir était diablement plus aléatoire, car nouvelle, comme nous allons le constater.

Le « Grand Fusil » l’incontournable auteur et ordonnateur de cette folle équipée n’a pas, un seul instant, quitté son coureur des yeux qu’ils possèdent malicieux et très, mais alors très avertis. Raphaël Geminiani, tel une éminence grise, est inexorablement, de tous les coups d’éclats et de génie mais aussi de tous les revers et camouflets du Normand. Sitôt délesté du podium, vers 17h00 où il reçoit le bouquet du vainqueur, le Normand rentre à l’hôtel où il s’adonne aux joies d’un bain régénérant. Après être passé dans les mains complices de son masseur attitré, Anquetil se rend sans attendre à l’aérodrome de Nîmes – Garons où il s’accorde le droit de répondre aux journalistes avides de confidences. Il est alors 18h passé de trente minutes. Le grand oiseau de zinc s’ébranle sur le tarmac peu avant 19h direction Bordeaux Mérignac. Arrivé sur les bords de la Gironde, environ une heure plus tard, il prend possession de sa chambre où il s’autorise un « farniente » d’un désuet tour d’horloge. Après un nouveau massage et un décrassement en règle, c’est coiffé d’un bonnet de laine du plus bel effet, que « Maître Jacques » se présente aux Quatre Pavillons, point de départ traditionnel du « Derby ».

Peu après le départ, le Normand souffre le martyr. Des soucis respiratoires viennent se greffer au sommeil errant qui taraude son corps endolori et noueux. Peu après la mi-course, les choses sérieuses prennent enfin formes par l’intermédiaire d’une attaque tranchante et enlevée de François Mahé. Le Breton d’Arradon ouvre la route comme à ses plus beaux jours. Il est vrai que le Morbihannais s’achemine vers sa dernière saison professionnelle. Anquetil, lui, souffre et tente de s’abriter en queue de peloton. A Chartres, « Stab », toujours aussi impulsif et rageur, élabore une contre-attaque dans laquelle il convie le « Major » et … « Maître Jacques », en personne. Les trois hommes rejoignent le gendre de Léon Le Calvez et l’abandonnent à son imminente pré retraite. Le Parc des Princes, terme de Bordeaux Paris gronde de plaisir à l’écoute des annonceurs. A quinze bornes de là, Jacques Anquetil requinqué et opiniâtre à souhait place, alors, un « caramel » à la faveur de la côte de Picardie. Tom Simpson tente un instant de s’ériger à la hauteur de « Goliath » mais le « bonbon » déposé, plus avant, par ce dernier est frelaté et reste en travers de la gorge du Britannique. « Stab », à son tour se retrouve occis par l’insolence et le toupet du néophyte. Le Normand fond sur Paris et son aisance n’a d’égale que le grain de folie qui anime ce phénomène de certitude. Le Parc des Princes est au garde à vous, tout Paris chante les louanges de l’ « ange blond » exterminateur. La foule enthousiaste hurle son nom, c’est un délire indescriptible. Le Normand, les yeux embrumés de larmes, donne ses derniers tours de manivelles. L’émotion étreint ce prédateur pourtant imperturbable. La fatigue mêlée à la messe que lui alloue le peuple de la capitale, sorte de réhabilitation ponctuelle, lui inspire des sentiments jusqu’alors méconnus et inavouables pour un cador de son rang.

Plus que le Tour, ces quatre jours de pure folie ont éclaboussé cette saison 1965.

L’exploit n’est pas mince car jamais réalisé, auparavant, et pas davantage depuis. Je crois que personne d’autre que le Normand n’aurait pu tenter et dompter pareille ineptie. Jacques Anquetil que l’on blasphème à loisir pour son autoritarisme légendaire, sa faconde outrancière et son indécrottable impudence laissera l’empreinte d’un coureur, hors norme. Novateur, pugnace, pétri de classe il restera celui qui aurait pu porter le record des victoires dans la Grande Boucle à des sommets que l’on n’imagine même pas encore aujourd’hui.

Pour tout ce qu’il a réalisé, le Français occupe dorénavant et pour l’éternité une place au sommet de la hiérarchie des « Géants de la Route ». On peut aisément situer le Normand juste derrière l’intouchable « Cannibale » à hauteur du « Campionissimo » et juste devant le « Blaireau » et « Gino le Pieux » !

 

 

Michel Crepel

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