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Raphael géminiani


Invité

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Salut,

Un heureux anniversaire à GEMINIANI qui nous fait vibrer pendant des années, alors que nous étions des jeunes cyclistes. J'ai eu le bonheur de le rencontrer l'ors d'une course à SAINT RAPHAEL, dont il était l'organisteur et le Parrain. Echappé avec deux autres pédaleurs, nous avons été dérivés du circuit par un commissaire de route pas trés au courant!!! GEMINIANI a neutralisé la course et a redonné une second départ, en préservant les minutes d'avance que nous avions. Mais la fougue du peloton, l'a emporté et aprés un temps trés court tout le monde est reparti sur nos "basques".J'ai terminé Etc..mais tellement riche des quelques mots de réconfort que ce Grand Monsieur nous avait adressés en consolation de notre déconvenu.

Merci à GEMINIANI, et à tous ces professionnels qui nous ont transmis leur passion.

A bientôt JEF

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Le "Grand Fusil" ? C'est ça !!!!

 

Tour 58?: «?Gem?» éclabousse de sa classe un Tour que Charly Gaul remporte dans la Chartreuse.

?

La 45ème édition de la Grande Boucle fera honneur, une fois n'est pas coutume, à nos voisins d'Outre Quiévrain en érigeant son chapiteau sur l'incontournable et emblématique Grand-Place de Bruxelles. Cataloguée à juste titre par Victor Hugo comme une des places au monde les plus belles et les plus grandioses, la Grand-Place abrite, en effet, outre l'Hôtel de Ville de la cité de l'OTAN, la Maison du Roi, ou Broodhuis voir, pour les amateurs invétérés de houblon, le Musée des Brasseurs Belges et elle s'avère, en outre, être inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, depuis l'an 1998. Quel plus bel et représentatif endroit pour rendre hommage à un peloton et une nation pour lesquels cyclisme rime avec authenticité que la ville du "père" de la Fanette ou de l'"amant" éconduit de Mathilde et de Madeleine.

1958, la rebelle, représente pour nombre d’entres nous l’éclosion d’une demi-siècle de domination Castriste et paradoxalement l’intronisation du plus placide et respectable Pape contemporain, Jean XXIII. Plus spécifiquement, cette année chère aux adorateurs invétérés de la cinquième République constitutionnelle Gaulliste verra la RTF se pourvoir du premier directeur du service des sports de la télévision naissante en la personne de l’inénarrable et très talentueux Raymond Marcillac. Outre la Coupe du Monde de football en Suède, retransmise pour les heureux bénéficiaires de la petite lucarne, le cyclisme par l’intermédiaire de la Grande Boucle fera son apparition à l’occasion d’un résumé d’étape en début de soirée à la clôture de la, déjà, grande messe du 20 heures. Le sport et la politique ne font pas nécessairement bon ménage et ce n’est pas le cri «?Je vous ai compris?», lancé, un jour de juin au balcon du gouvernement d’Alger par le «?Général?», devant une foule exubérante qui, un mois suivant, cautérisera, cicatrisera la plaie béante, qui taraude encore et toujours l’indéracinable Marcel Bidot. Cette meurtrissure indélébile, née du désistement du «?Boulanger de St Méen?» et du «?Grand Fusil?» un an auparavant lors du Tour 1957, demeurera à jamais ancrée dans l’esprit tortueux et torturé du «?boss?» de l’équipe de France. Ce crime de lèse majesté aura, soyons en sûr, des répercussions quant à l’annonce de la composition de la formation tricolore pour la kermesse de juillet de cette année d’hiver Olympique. L’émergence du gamin de Mont Saint Aignan, vainqueur, malgré tout, de son premier Tour à l’âge de 23 ans ajouté au triomphe de «?Stab?» sur les routes Ibériques en ce printemps 1958 n’apaiseront pas le moins du monde la rancœur du Champion de France de Montlhéry 1929. Aujourd’hui, Jacques Anquetil étant, de par son succès de 57, devenu incontournable, c’est à lui que reviendra la délicate mission de trancher en faveur de Louison Bobet et Raphaël Geminiani. Le Breton ou l’Auvergnat, au sein de la formation tricolore, étant la seule alternative abandonnée au Normand par le Champenois. Finalement, le Giro interviendra à point nommé pour départager les deux belligérants et la place obtenue, derrière Baldini, Brankart et Gaul, par le lauréat du triptyque Tour 53-54-55 s'avèrera plus convaincante que le huitième rang du Clermontois. A propos de ce Tour d'Italie remporté, avec maestria, par Ercole Baldini, il serait bon de rappeler que ce coureur natif de Villanova di Forli apparaissait, à l'époque à 25 ans, comme un futur très grand. En effet, Champion du Monde de poursuite et Champion Olympique amateur en 1956, deux ans auparavant, le Romagnol poussa l'impudence jusqu'à devenir Champion d'Italie professionnel la saison suivante. C'est donc ceint de sa tunique tricolore que Baldini triomphera lors du Giro 58, dominant, bien naturellement et outrageusement les contre la montre, chevauchant, pour l'occasion une monture nantie de pneus gonflés à l'hélium.

Ainsi, au départ de Bruxelles ce 26 juin, autour de Jacques Anquetil et Louison Bobet, la formation nationale présentera Gilbert Bauvin tout frais émoulu lauréat du Tour de Romandie , Louis Bergaud double vainqueur de la Polymultipliée (57,58), André Darrigade le "Basque Bondissant" qu'il n'est plus nécessaire de présenter, Jean Forestier maillot vert sortant, Joseph Groussard auréolé d'un succès lors des Boucles de la Seine, François Mahé équipier modèle onzième de la dernière Vuelta, le surprenant espoir Francis Pipelin vainqueur du Midi Libre et dauphin de Louis Rostollan sur le Dauphiné Libéré, René Privat premier au Tour du Var, Jean Stablinski "Stab" l'inénarrable multiple Champion de France et grand triomphateur du récent Tour d'Espagne et enfin Roger Walkoviak "Walko" le toujours aussi décrié maillot jaune de 1956. Que du beau linge à n'en pas douter.

Le "Grand Fusil", pour sa part, fulmine et le Clermontois, dont la dialectique n'a d'égale que sa hargne en course, rumine une vengeance qu'il concocte nanti d'une certaine délectation. En attendant, incorporé au sein de l'équipe Centre-Sud, aux côtés des Henry Anglade, Jean Dotto, Jean Graczyk, Marcel Rohrbach ou Antonin Rolland, "Gem" est, néanmoins, conscient que ses chances de remporter, un jour, la Grande Boucle sont comptés et que seule une course de mouvement, débridée et échevelée, peut, éventuellement, lui permettre de jeter le trouble dans les esprits des leaders des formations nationales afin de parvenir à honorer ses desseins de succès. Il va s'y employer.

Pendant ce temps, faisant fi de toutes ces querelles de clochers, la métamorphose de la Grande Boucle poursuit son petit bonhomme de chemin. Ainsi, la texture des tenues des coursiers est devenue beaucoup plus fonctionnelle et surtout l'esthétisme commence sensibiliser l'organisation, télévision oblige. Un service médicalisé de haute tenue, parfaitement équipé, apparaît et s'est substituée aux traditionnels médecins. Outre le fait de disposer d'une camionnette d'assistance technique, qui remplace très avantageusement l'imposant et lourd véhicule de l'organisation, les directeurs sportives disposent, dorénavant, d'une radio intérieure apte à informer ces derniers du déroulement événementiel de la course. La presse et médias bénéficieront également de ce privilège et pourront ainsi diligenter l'information et la diffusion de leurs propos au sein d'une salle de presse, nouveau havre de réflexions pour journalistes de tous bords. Enfin, la kermesse de juillet, ne serait pas digne de cette appellation sans l'intronisation d'une caravane publicitaire. Celle-ci, s'ébranlera et précédera l'avant garde du peloton d'une heure et trente minutes, ce facteur temps sera, bien évidemment, régulé en fonction de l'évolution de la course, par le Commissaire général commercial. Ce dernier a pour mission de naviguer entre la tête de course et la caravane publicitaire afin d'organiser le service d'ordre statique en fonction des aléas du parcours. Il doit, enfin, informer Jacques Goddet et Félix Lévitan, trônant devant le peloton en liaison radiophonique constante, de tous problèmes pouvant nuire au bon ordonnancement de l'étape.

De Bruxelles à Gand, terme de l'étape initiale, la formation tricolore démarre en fanfare cette 45ème édition par l'entremise d'un "Basque Bondissant" flageolant et punissant partenaires et adversaires de toute sa classe. L'entrée en France verra le Batave Gerrit Voorting régler, à Dunkerque, le transalpin Piero Baffin et l'Irlandais de la formation Internation, Seamus Elliott, respectivement second et troisième. Sur les routes menant au Tréport, le valeureux Gilbert Bauvin, lauréat du récent Tour de Romandie, sera l'instigateur d'une échappée de sept hommes, dont "Stab" et le Belge Noël Foré, qu'il s'adjugera avec maestria, cinq minutes devant un peloton désarçonné pour la circonstance. Le paletot jaune est désormais sur les épaules du Néerlandais Wim Van Est, pistard et rouleur émérite, devant Bauvin et Foré, tous deux sous la minute. Le peloton prend alors la direction de la capitale avant de rejoindre dans la foulée la Normandie. A Versailles, donc, le régional Jean Gainche, du comité Ouest Sud Ouest, se permet le luxe et l'outrage à la fois de coiffer André Darrigade en personne à l'emballage. La remontée sur Caen sera le théâtre d'une échappée royale de huit coursiers où figureront des cadors tels Louison Bobet, Gastone Nencini, Raphaël Geminiani, Gilbert Bauvin, Jacques Anquetil et Jozef Planckaert, excusez du peu. Profitant du marquage implacable de toutes ces "huiles", le roublard et besogneux Lot et Garonnais Settimio "Tino" Sabbadini offrira, pour l'occasion, au comité Ouest Sud Ouest sa deuxième victoire d'étape après celle glanée par Gainche, la veille. Au soir de cette cinquième étape, Gilbert Bauvin enfile la tunique d'or de leader plus de trois minutes devant Jozef Planckaert et André Darrigade. Cette hégémonie tricolore en haut de la hiérarchie laisse, à ce moment de la course, augurer des lendemains enchanteurs. Toutefois, lorsqu'on se penche objectivement sur le comportement des uns et des autres, tout n'apparaît vraiment pas si rose que cela. Le "Boulanger de St Méen" ne semble plus posséder les jambes du petit mitron qu'il fut, "Maître Jacques", quant à lui, marié depuis peu, convole plus sûrement en juste noce qu'à l'assaut des aspérités du macadam, "Walko" à laisser un quart d'heure et toutes ses illusions sur la route de Caen en offrant sa roue à Bobet et le "Basque Bondissant" prêche dans un désert d'ingratitude, seul au sein de l'adversité en nombre. Seul le teigneux et volontaire Gilbert Bauvin, dauphin malheureux de "Walko" deux ans auparavant, entretient encore un faux semblant d'unité.

C'est le moment choisi par notre "Gem" national pour honorer sa dette envers "Bidot and Co". Et pour qui connaît le "Grand Fusil", ses élans gouailleurs ne sont jamais dépourvus d'actes impulsifs et dévastateurs. Depuis une semaine, déjà, l'Auvergnat rongeait son frein en silence (sic). Lors de la sixième étape, qui menait les coureurs de Caen à St Brieuc, Raphaël Geminiani fit montre d'une science de la course et d'un sens hybride de la communication à nul autre pareil. Le crachin, le plafond bas accentuait la morosité d'un peloton en apathie. En outre, les routes Normandes ne sont pas nécessairement propices à réveiller les velléités offensives des plus nantis. Pourtant le facétieux Clermontois s'était, depuis des lustres, montré circonspect sur la condition physique de ses compatriotes mais néanmoins ennemis patentés de la formation tricolore. Pour étayer les sensations du "Renard des Volcans", le "Boulanger de St Méen" souffrait de problèmes intestinaux et traînait sa misère en queue de peloton. Pendant ce temps les baroudeurs de la formation Centre Midi se démenaient à l'avant et plaçaient des banderilles fulgurantes dans le but d'éprouver un peu plus des tricolores passablement amorphes et empruntés. Soudain, une accélération plus acérée que les précédentes propulsa une quinzaine d'hommes à l'avant. Outre Geminiani, Darrigade, Mahé, Pipelin, et Groussard, côté Français, Nencini et Adriaenssens côté étranger étaient de la partie de manivelles qui allait embrayer. Tel un capitaine de route aboyeur, l'Auvergnat remontait la file des coureurs en exhortant ces derniers de rouler à bloc. "Gem" se porta même à hauteur de Nancini et Adriaenssens pour les fustiger et les convaincre que cette échappée pouvait servir leur dessein de victoire finale à Paris. Impayable l'Auvergnat. En effet, hilare et pas mécontent de l'énigmatique imbroglio qu'il provoquait sur la course et dans les esprits, le roublard et diplomate coureur du confins des plaines de Limagne se contentait de faire de la "patinette" dans les roues de ceux là même qu'il venait de motiver à l’extrême. Un soupçon agacé tout d'abord, Bidot fit décrocher ses deux ouailles Pipelin et Groussard pour tenter de sauver l'essentiel à l'arrière. En pure perte. Furieux, ensuite, le boss des Tricolores sacrifia le "Basque Bondissant", alors virtuellement maillot jaune. Toutes ces manoeuvres parvinrent finalement à leur fin et un regroupement se produisit une dizaine de bornes plus loin. Toutefois, les inspirations de Raphaël Geminiani s'avèreront démoniaques à court terme. En effet, le groupement effectué, "Gem" qui n'avait pas, jusqu'alors, donné un coup de pédale de trop dans l'échappée initiale se hissa irrésistiblement sur celles ci, à la faveur d'une côte bienvenue, et plaça un démarrage détonant. La tactique du truculent Auvergnat était parfaite, un modèle de pugnacité et d'intelligence. Les tricolores aphones après la poursuite, Nencini et Adriaenssens aux abonnés absents, éreintés par les efforts que leur avaient imposés le farceur, les adversaires de ce dernier ne possédaient plus les ressources nécessaires à éviter la débâcle que ce manipulateur hors norme ne tarderait pas à leur infliger. A St Brieuc, Bobet, Anquetil, Nencini et consorts déboursèrent la bagatelle de dix minutes.

Goguenard et hâbleur invétéré ce fan de "Baptistou", croisé lors de ses succès au Bol d'Or des Monédières, ne tarit pas d'éloge sur ses dons de tacticiens et harangue l'assistance sur le manque d'audace et de courage de la jeune classe montante. Pierre Chany résumera superbement l'état d'esprit de l'Auvergnat au soir de cette étape lorsque ce dernier interrogera la presse "Mais qu'est ce qu'ils croient dans l'Equipe de France ? Si Anquetil veut gagner le Tour, il devra venir me chercher. Vous y croyez, vous ? Moi, pas ! Venez me voir à l'hôtel. Vous aurez des tas de choses à écrire et vous ferez de bons papiers ! J'ai 33 ans, bon Dieu, mais ils sont deux fois plus vieux que moi !". Au classement général, le Hollandais Gerrit Voorting trône en jaune une minute devant Mahé et à un peu plus de deux minutes Geminiani suit, imperturbable. Des favoris déclarés, au départ de Bruxelles, seuls Bauvin et à un degré moindre Planckaert sont positionnés sous les dix minutes.

La huitième étape donnera l'occasion aux rouleurs de tenter de grappiller du temps et de remonter dans la hiérarchie. Sur le circuit de Châteaulin, long de 46 bornes, c'est, ô surprise, l'"Ange de la Montagne", le Luxembourgeois Charly Gaul, qui se permet le luxe inouï de coiffer "Maître Jacques", en personne, sur la ligne pour sept secondes. "Gem" assure à un peu plus de deux minutes du Champion du Grand Duché, juste devant Louison Bobet. Le lendemain, sur la route de St Nazaire, André Darrigade revêtira le maillot jaune à la faveur d'une échappée à sept dont il règlera aisément le sprint. Les sprinteurs, les Italiens Pierino Baffi et Arrigo Padovan ainsi que le Belge Martin Geneugden s'illustreront, d'ailleurs, lors des étapes suivantes qui mèneront les coureurs aux pieds des Pyrénées. Au matin de la montée de l'Aubisque, Raphaël Geminiani se trouve idéalement positionné en embuscade à une minute trente de Darrigade. Cette étape qui conduit les coureurs à Pau sera snobée et malgré le passage au sommet de l'Aubisque de l'"Aigle de Tolède", un groupe d'une quinzaine d'unités se formera dans la descente où figureront tous les favoris de l'épreuve encore valides. Pour la petite histoire, Louis Bergaud, membre de la formation tricolore, redonnera un peu de baume au coeur à Marcel Bidot en s'adjugeant l'étape devant le Néerlandais Piet Damen. Il est vrai que les Pyrénées ont été passablement escamotés par les organisateurs. Seul le Portet d'Aspet viendra agrémenter la seconde et dernière journée dans le massif Franco-Espagnol. Après un nouveau numéro de Frédérico Bahamontes sur les pentes de la seule difficulté du jour, André Darrigade règlera un peloton, sans surprise, d'une quarantaine de coursiers. Baffi et Darrigade feront fructifier leur capital victoire d'étape en s'imposant à Béziers et Nîmes. En jaune à la veille d'affronter le "Géant de Provence", l'Italien Vito Favero ne se berce guère d'illusion sur le sort que lui réserve la montée du monstre qui sera escaladé, pour la circonstance, en solitaire. Ce contre la montre de vingt deux bornes, véritable ascenseur vers l'échafaud, hante insidieusement et de manière pernicieuse les esprits, même les plus blindés, des coursiers depuis le départ de Belgique. Après le festival réalisé sur le circuit de Châteaulin, une semaine auparavant, personne n'ose imaginer une défaite du lauréat du Giro 56. Charly Gaul, ne laissera pas le doute s'installer dans l'imagination fertile des jeunes prédateurs présomptueux aux dents acérées. En effet, il atomisera la concurrence, excepté peut être Bahamontes relégué à la demi minutes au somment du Ventoux. Le "Mont Chauve", véritable juge de paix, où la souffrance dépasse l'entendement, venait de délivrer sa sentence implacable et, par la même occasion, redistribuer les cartes.

Tout le monde à trois minutes et plus. Les favoris ? Brankart à trois minutes, Anquetil à quatre, Bobet et Geminiani à cinq et Nencini à sept minutes.

Bonne nouvelle, tout de même, "Gem" se pare de jaune mais l'"Ange de la Montagne" se trouve désormais dans l'aspiration du Clermontois à environ trois minutes. L'étape de transition du lendemain entre Carpentras et Gap s'annonçait pourtant relativement tranquille en raison des deux jours dantesques à venir. La chaleur accablante et suffocante qui régnait dans le Vaucluse et les Hautes Alpes en ce jour de Fête Nationale laissait subodorer une trêve consensuelle et salvatrice. C'était sans compter sur les aléas de la course et les subterfuges ponctuels des coureurs qui font que le cyclisme n'a que rarement été une discipline rationnelle. Ainsi, environ soixante bornes après le départ de Carpentras, parcourus à un train de sénateur en goguette, Charly Gaul fut victime d'un bris de dérailleur. Rien de bien obsédant, ni d'angoissant pour le Luxembourgeois, se dit on alors, à cette allure de halage. Excepté qu'un précédent connus de tous, sauf du principal protagoniste apparemment, a eu lieu deux ans plus tôt sur les routes surchauffées du Giro. Et ce précédent est déjà entré de plein pied et à jamais dans la légende du cyclisme sous le terme, on ne peut plus réaliste et représentatif, de "Coup de la Pissette". Ce qu'il avait osé, deux années auparavant, pour une "pissette" de trop, Raphaël Geminiani allait il récidiver, aujourd'hui, pour un dérailleur de moins ? L'idée de rejeter cette sangsue ancré à son porte bagages à des années lumières de son paletot immaculé ne résistera pas bien longtemps au soupçon de compassion, qui lui a subrepticement effleuré l'esprit. Le "Grand Fusil" porta, aussitôt, une attaque tranchante et entraînera dans son sillage Favero, Planckaert, "Stab", Adriaenssens et Bergaud. Plus loin, Darrigade, arc bouté sur sa monture, ramènera Anquetil dans le groupe. Nencini et Graczyck profiteront de la providence et de l'aspiration du Normand à la planche. Les piégés du haut du classement Bauvin et Mahé se retrouvèrent marris en compagnie d'un Bobet incapable de prendre les roues et d'un Gaul malchanceux qui réintègrera le peloton des battus un peu plus tard. Le Breton se ressaisira dans la descente de Foreyssasse où Gaul, toujours autant béni des dieux, sera victime d'une chute malencontreuse. Dans l'aventure, le "Boulanger de St Méen" reprendra trois minutes au Luxembourgeois, mais en cèdera sept à Nencini, vainqueur au sprint à Gap. Au général, la situation est on ne peut plus limpide. "Gem" arbore une tunique jaune seyante et apparemment solidement accrochée sur ses épaules. Son plus sérieux adversaire, Anquetil pointe à huit minutes, Nencini, lui, avoisine le quart d'heure, quart d'heure que Gaul, pour sa part, a allègrement franchi.

Gap - Briançon, par les cols de Vars et d'Izoard permet à l'"Aigle de Tolède" de s'affirmer comme un futur danger à venir pour la victoire finale à Paris. L'Espagnol réalise, pour l'occasion, un sacré numéro sur les pente d'un l'Izoard jonché d'une foule en délire et remporte l'étape non sans avoir préalablement écrémé, majestueusement et pour le compte, le groupe auquel il appartenait initialement. Aucun bouleversement notable au général ne vient obscurcir la mine rayonnante et réjouie de "Gem". A la veille d'aborder la dernière étape Alpestre, personne n'imagine un seul instant une défaite de l'Auvergnat. Anquetil est trop loin et ne fera rien pour nuire à son "ami". Nencini, dépité, s'est montré convaincant et entreprenant, lors des dernières étapes aux parcours accidentés, mais ses douze minutes de débours semblent rédhibitoires. En ce qui concerne Gaul .........

Cette vingt et unième étape Briançon - Aix les Bains offre un tracé des plus tourmentés. Pas moins de cinq escalades, le Lautaret, le Luitel, Porte, le Cucheron et enfin le Granier. Pas de quoi, néanmoins, effrayer un coursier de la trempe d'un "Gem" euphorique. Pourtant, ce matin là, la météo est exécrable, les nuages bas et noirs emprisonnent les cimes et la pluie qui tombe dans un flot incessant glace les os des coursiers déjà passablement affaiblis et meurtris pas les efforts fournis depuis le départ de Bruxelles. Un temps apocalyptique règne sur la course et les présages les plus néfastes voire les plus rocambolesques vont bon train et foisonnent dans l'aire de départ. Le Lautaret monté au train par l'ensemble des survivants ne laisse aucunement augurer le séisme qui va suivre. Les premiers lacets du Luitel sont abordés avec la même nonchalance que le Lautaret lorsque soudain Charly Gaul jaillit tel un diable de sa boîte et se porte énergiquement en tête de la course. Seul à réagir, Bahamontes demeure, toutefois, à distance respectable du diablotin revigoré. Derrière c'est l'hallali, la curée. Tous, suiveurs, journalistes, inconditionnels et coureurs pensent à cet instant précis et à juste titre, ne soyons pas hypocrites, que le présomptueux Luxembourgeois désirent réaliser un show et tenter de s'attribuer le plus de points possible au sommet des cols afin de bien figurer au classement final du Grand Prix de la Montagne. Que nenni, plus la course évolue dans le temps, plus les écarts deviennent conséquents. Esseulé, loin derrière, "Gem", sentant son paletot s'effilocher aussi promptement que les secondes qui s'égrènent, tente de limiter l'hémorragie mais la compagnie énigmatique d'un Bobet agonisant à ses côtés ne lui est d'aucun secours. En effet, mainte fois l'Auvergnat s'écarte et invite le Breton à un relais que jamais il n'assurera. Cet épisode douloureux demeurera à jamais une énigme pour le "Grand Fusil". Avant de traverser Grenoble, Charly Gaul précède Frédérico Bahamontès de deux minutes. Anquetil, qui s'est débarrassé de Favero, victime d'une crevaison, est en point de mire de l'Auvergnat auteur d'une descente du feu de dieu. Le col de Porte se présente alors devant les belligérants. La pluie a redoublé d'intensité et les muscles des "sautes moutons" sont noueux et durs comme l'ébène. Le froid paralyse les membres décharnés et tels des automates les coureurs commencent à négocier les premières pentes de Porte. A ce moment précis, Jacques Anquetil essuie une impressionnante défaillance. Sans force, le visage hagard, affalé sur sa monture, le Normand, lui l'esthète du vélo, suggère à l'Auvergnat de poursuivre seul son périple. Lorsque Bobet arrive, à son tour, à hauteur d'Anquetil, le Normand adresse au Breton les mêmes consignes, les mêmes suggestions de détresse qu'il avait délivré à l'Auvergnat, quelques instants plus tôt. A mi pente, "Gem" qui avait récupéré Adriaenssens, au hasard d'un moment où l'acuité visuelle se montrait favorable, fut contraint de changer de pédale. Le Belge s'en fut alors, à la poursuite du Luxembourgeois, sans le moindre égard envers un maillot jaune en très mauvaise posture.

Malgré les renforts, plus virtuels qu'efficaces, de Rorhbach, Dotto et Anglade, l'écart ne cesse de se creuser entre le maillot jaune et le Luxembourgeois aérien, virevoltant dans la tourmente. A chaque sommet la punition s'accroît. Elle sera de plus de sept minutes au Cucheron et franchira les douze au Granier. Quand il franchira la ligne un peu plus de douze minutes après son bourreau du jour, l'Auvergnat s'effondrera en larmes. Ereinté, dépité mais toujours aux abois et belliqueux envers les traîtres, "Gem" vindicatif, vomira, alors, son ressentiment, tel un venin, à l'encontre de ceux qui, pour lui, l'avaient abandonné à son triste sort. "Des Judas ...tous des Judas !". Récoltait il, à ce moment là, ce qu'il avait semé avec gourmandise et boulimie quelques jours auparavant ? Un fait est certain cependant à savoir, qu'au même titre que la disparition prématurée de ses amis Fausto Coppi et Jacques Anquetil, cette journée d'abomination, où le rêve utopique de toute une existence de cycliste s'envola, demeurera à jamais dans le coeur et la mémoire du plus Latin des Auvergnats comme une plaie béante, une déchirure insoutenable, une plaie béante dont les cicatrices indélébiles ne cicatriseront jamais tout à fait.

Pourtant, jamais Geminiani n'éprouvera de ressentiments à l'encontre de Jacques Anquetil. Homme de coeur, certes impétueux et parfois colérique à l'extrême, mais toujours affable, généreux et respectueux d'autrui, "Gem" s'enquit de la santé de son futur poulain abandonné seul et malade au bord de la rupture sur les pentes de La Faucille, le lendemain de sa défaillance dans la Chartreuse. On apprendra, plus tard, que le Normand avait bel et bien faillit ce jour là, y abandonner tout espoir de carrière à défaut d'y laisser son existence même. A Besançon, donc, le "Basque Bondissant" claquait sa cinquième victoire d'étape, quant au classement général, au soir de l'étape, il n'apparaissait plus d'une grande importance ni d'une quelconque signification tant la suprématie, affichée depuis le départ par Charly Gaul lors des exercices en solitaire, ne laissait planer aucun doute quant à l'issue finale de l'épreuve. Vito Favero, maillot jaune et auteur d'un Tour plus qu'honorable ne se fait, d'ailleurs, plus guère d'illusion tout comme son malheureux dauphin Raphaël Geminiani pointé à seulement trente secondes de L'Italien à la veille de mettre "tout à droite" pendant soixante quatorze interminables bornes. Charly Gaul, toise, en effet, tout ce petit monde de sa troisième place à une minute de l'usurpateur Transalpin. Pourtant, de Besançon à Dijon, le Luxembourgeois, pas épargné non plus par la lassitude, n'irradiera, ne surclassera pas la concurrence, il fera le métier à savoir, se contentera de rejeter, de mettre hors de portée ses principaux rivaux. Propre et sans bavure, du bel ouvrage. Pour l'anecdote, L'Italien Pierino Baffi clôturera, à trois victoires, son compte de succès d'étape en réglant, nanti de la vélocité qui le caractérise, le vainqueur final du classement par points, le tricolore Jean Grazcik. L'"Aigle de Tolède", pour sa part devancera de très peu Charly Gaul au Grand Prix de la Montagne et se contentera d'un accessit à Paris avant de connaître les mêmes émotions, les mêmes sensations que l'"Ange de la Montagne" l'année suivante.

L'Auvergnat, maudit dans la Chartreuse, alors qu'il s'était montré absolument éblouissant tout au long des trois semaines que dura cette Grande Boucle, restera, néanmoins, comme l'homme incontournable de cette édition. Charly Gaul aura su profiter, à merveille certes, des conditions de course apocalyptique de la vingt et unième étape pour dompter les montagnes et bousculer les évidences mais Raphaël Geminiani, même dans l'adversité, se sera montré omniprésent tous les jours. Pesant sur la course, agissant à sa guise, faisant montre d'une science et d'une connaissance de la course parfaite voir incomparable, le Clermontois s'érigea au fil des jours comme le véritable patron de ce Tour 58. Mais voilà, à l'instar d'un Raymond Poulidor, "Gem" ne recueillera jamais les fruits du labeur de toute une vie de coureur cycliste de grand talent.

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Salut "Lucho", la santé ? Florian et Mme "Juan Luis Castellanos",tu bien gustada ?

Mouai, je sais, ami mais pour un texte nomminatif circulant sur la toile et ailleurs, il n'est pas simple d'égratigner une "icône" sans preuves tangibles (de l'auteur s'entend) et ce même si je connais ces allégations de personnes qui l'ont côtoyé, comme toi, "JL" ! Mais au delà d'entâcher sa réputation sulfureuse ça donne encore plus de "force" charismatique à ce "bonhomme" à nul autre pareil !😉

PS : Si la "Gobelette" a tendance à épargner cette génération, la magouille, elle, perdure et crois moi elle s'emplifie mais demeure confidentielle car insidieuse !


 

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  • 9 months later...

hazard avec un z ...vous devez confondre avec zorro ,corrigez vos fautes d'abord !!!!  je n'ai pas d'idole et ne me permet pas de juger comme vous !! mais ceux qui n'ont jamais été  champions  aiment bien critiquer !! c'est le mal français quand aux sous entendu sur la religion ,vous devriez savoir qu'en AFRIQUE beaucoup de pays ne sont pas musulmans !! et ceux qui de suite mettent en avant leur appartenance à des sectes cela ne m'interesse pas étant non croyant et fier de ne pas appartenir à des groupes de fanatique ,se regroupant comme des moutons ...  biere un seul R , vous êtes aussi nul en ortographe que vous avez du être sur un velo .

merci d'eviter de me repondre

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Et oui "Jubilador", les aléas de l'existence sont moins heureux lorsque la partie s'achève pour certains d'entres nous ! Mais la roue tourne, toi tu es toujours en pleine forme malgré les "blessures" de la vie et ta progéniture est à l'orée de la sienne de vie ! Alors Viva la Vida, le Colombien mi amigo !!!😉

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  • 9 years later...

perso, j'adore quand "le grand Fusil" , nous raconte ses souvenirs avec Anquetil .. J'ai 2 très bons documentaires qui ont été diffusés sur ARTE il y à déjà quelques années et que je possède encore enregistrés sur cassettes VHS :  " l'histoire de Géminiani" et "le mystère Anquetil" ..  je ne me lasse pas de les revisionner de temps en temps ...

Bonne anniversaire à lui ..

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