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Le contre-la-montre !


Michel CREPEL

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L’effort solitaire : Les « contre la montre ». (Sujet rédigé au début du XXIème siècle) 

 

De tout temps, le contre-la-montre, épreuve atypique, a suscité les polémiques et engendré les critiques les plus acerbes et les plus insidieuses de la part d'une partie du peloton peu enclin à jouer tous leurs acquis fonciers à la "roulette Russe" à la faveur d'un "exercice de style". Car c'est bien de cela qu'il s'agit, un "exercice de style". 

Pour annihiler les frustrations latentes de ces "nouveaux gladiateurs des temps modernes", ces "avaleurs de macadam", les instances fédérales et internationales vont élaborer des épreuves afin de satisfaire aux exigences de cette nouvelle corporation de rouleurs patentés. Ainsi sont nés le "Grand Prix des Nations" (voir le post de Maurice Archambaud), le "Trophée Baracchi" (par formation de deux coureurs) puis plus près de nous le "Grand Prix Eddy Merckx" et dernièrement, Pro Tour oblige, le "contre le montre d'Eindhoven" pour ne citer que les plus représentatifs à défaut  d'être les plus prestigieux (pour les deux derniers cités).

Les plus grands et "beaux" rouleurs s’y sont affrontés dans un domaine où puissance et élégance vont de pair et où, à l'inverse, l'appréhension et la tergiversation voir l'approximation ne font guère bon ménage. Ici, qu'on se le dise, il est nécessaire de "mettre du braquet", de rouler et rouler encore et toujours sans arrières pensées, d'aucune sorte, sans calcul, à s'en faire "péter les varices".

 Les plus illustres s'y sont révélés, les plus teigneux s'y sont escrimés et les plus malchanceux s'y sont cassés les dents, mais tous s'y sont essayés avec, il faut bien l'avouer, des fortunes diverses. Les plus beaux fleurons de cette galerie d'artistes sont Français, une fois n'est pas coutume. En effet, "Maître Jacques" demeure, pour beaucoup d'inconditionnels dont je suis, le rouleur du siècle. Outre ses neuf triomphes aux "Nations" pour autant de participations, viennent s'ajouter le "Baracchi" ainsi que tous les "chronos" des "Grands Tours" auxquels Jacques Anquetil a participé. Imaginez le palmarès du Normand si d'aventure l'exercice solitaire avait eu droit de cité aux "Mondiaux" de l'époque (sans même parler des JO). Pourtant, à une certaine période de son hégémonie, le premier quintuple lauréat de la "Grande Boucle» trouva sur sa route un écueil des plus performants en la personne d'un autre tricolore à savoir Roger Rivière. 

Le "Roi du Vigorelli", détenteur du record de l'heure à deux reprises en 1957 puis 1958, trois fois Champion du Monde de poursuite (57, 58 et 59) et accessoirement grand triomphateur du Tour d'Europe amateur, était un esthète de l'effort solitaire. Athlète brillant, il avait été "conçu" pour les chronos, hélas la malchance abrégea une carrière, en devenir, un après-midi de juillet, lors du "Tour de France" 1960 dans la descente du col du Perjuret (voir post sur ce drame). Enfin, une quinzaine d'année plus tard, un Breton teigneux et "surdoué", Bernard Hinault, repris le flambeau pour faire de la ville de Cannes, où les "Nations" avaient pris leurs quartiers délaissant, à l'occasion et à jamais, "Chevreuse", son fief en y glanant cinq bouquets (vous ai-je "rédigé" un sujet intitulé "22 septembre 1984, le retour du "Blaireau" dans un de mes récits ? Car c'est un moment d'anthologie).

Outre, ces trois "phénomènes" de pugnacité, de nombreux champions se sont illustrés, et de quelle manière, dans cette spécialité de stakhanoviste, aujourd'hui connu et reconnu comme épreuve mais aussi "étape" à part entière. 

A ce titre, beaucoup de lauréats de grands Tours ont forgé leur succès grâce à leur suprématie sans partage lors des étapes chronométrées et à leur don inné de rouleur. J'en veux pour preuve le "Campionissimo", Fausto Coppi qui, lors de ses duels épiques contre "Gino le Pieux" Bartali, où tous deux tutoyaient le ciel en haut des cimes des Dolomites, par exemple, dû, certaines de ses victoires à ses dons de rouleur hors norme. Pour le "Cannibale", en revanche, le contre-la-montre ne servit qu'à creuser, encore un peu plus, le gouffre qui le séparait de ses adversaires lors des grands Tour. Enfin pour le "Grand Miguel", le premier contre la montre du Tour restera, à jamais, la référence suprême d'un "peuple assujetti" à l'écrasante domination de son "Roi". L'enfant introverti de Villava a littéralement "tué" les cinq Tours qu'il a remporté lors de ces étapes chronométrées. 

Je pourrai, par ailleurs, en citer bien d'autres tel Francesco Moser. Le "Cecco" remporta le Giro lors des contre-la-montre, soigneusement élaborés, pour la circonstance, hôte oblige, par le sulfureux et peu scrupuleux Vicenzo Torriani. En fait le "Maître des lieux" agrémentait un tracé déjà énormément calqué sur les aptitudes de son "poulain", le contre-la-montre favorisant ainsi, outrageusement, les desseins du cadet de la fratrie Moser. L'"Horloger" Helvète Tony Rominger, auteur d'un triplé dans la Vuelta (1992, 93 et 94) et lauréat du Giro, la saison suivante, remporta tous les chronos de ses Grand Tours victorieux. Un autre Suisse, Alex Zuelle a œuvré ainsi lors de ses deux victoires dans la Vuelta (96 et 98). 

Aujourd'hui, des coureurs tels l'Américain Lance Armstrong et l'Allemand Jan Ullrich ont une telle marge de "confort" dans l'effort solitaire qu'il devient rédhibitoire pour leurs adversaires d'inverser la tendance. 

 

 

Michel Crepel

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